Au-delà des dispositifs officiellement mis en place pour venir en aide aux personnes sans domicile fixe, l’auteur de l’article analyse la manière dont d’autres logiques aussi discrètes que ségrégatives visent ces populations fragilisées. A partir de différents terrains ethnologiques menés en région parisienne, il apparaît que les SDF ont bien une « utilité au monde » pour la société dite intégrée. Se pose alors la question de la logique symbolique et économique du recyclage des choses et des personnes.

Depuis plus d’un quart de siècle nos recherches ont porté sur les SDF parisiens, leur mode de vie, leur hébergement en urgence, leur alimentation ou encore leur santé. À travers ces diverses thématiques, nous avons été amené à constater qu’au-delà des dispositifs officiellement mis en place pour leur venir en aide, d’autres logiques aussi discrètes que ségrégatives les visaient. Ces dernières, qu’elles relèvent d’un aménagement urbain dissuasif  ou bien qu’elles masquent toute possibilité de rendre compte, statistiquement, de leur devenir par la réinsertion ou la mort, nous ont alerté sur la part d’ombre que recelait l’aide qui leur était apportée. Nous avons ainsi pris conscience qu’une analyse démontrant leur utilité pour la société pouvait être faite en articulant les mécanismes économiques qui les environnent aux processus symboliques qui les polluent et les assimilent aux déchets. Il apparaît alors qu’à travers leur situation sociale ainsi que l’aide dont les SDF sont l’objet, la société tire profit de ces « inutiles au monde ». La logique symbolique et économique du recyclage des choses et des personnes prend alors tout son sens.

Cet article s’attachera à appuyer cette analyse à travers divers dispositifs dans lesquels sont pris les SDF. Ainsi seront tout d’abord questionnés la ségrégation urbaine et l’hébergement en urgence auquel il·elle·s sont assigné·e·s. Ensuite sera mise en évidence la constitution d’un marché de la pauvreté. Nous examinerons alors plus particulièrement l’aide alimentaire et le recyclage des vêtements auxquels il·elle·s ont accès.

Les objets de la ségrégation urbaine

La ville n’est pas un lieu de liberté également ouvert à tou·te·s les citoyen·ne·s[1]. Elle n’en offre que l’apparence. Notamment depuis que ses divers aménagements sont conçus et réalisés selon la logique de prévention situationnelle qui, dans sa conception même, se révèle ségrégative[2]. Avec la loi 2002-1094 du 29 août 2002 la dimension sécuritaire s’invite et prévaut dans la conception de l’espace public à travers des conseiller·ère·s formé·e·s au sein  de l’Institut des Hautes Etudes de la Sécurité Intérieure. L’architecture et l’aménagement urbain se soumettent progressivement aux impératifs de la sécurité et de la surveillance en sacrifiant, dans leurs projets initiaux, la dimension esthétique et la diversité des volumes, au profit  de la vidéo-surveillance : plus de bâtiments aux volumes arrondis comportant des angles morts ni de grands arbres sur les places publiques susceptibles de gêner l’efficacité des caméras.

Ces impératifs s’imposent dans le cadre des Contrats Locaux de Sécurité qui en définissent les effets dans chaque agglomération. L’évitement des porches ouverts au profit d’une séparation radicale entre l’espace public et l’espace privé, renforcée par plusieurs grilles infranchissables successives, chacune pourvue de son digicode sécurisé, va également dans cette direction, tout comme la disparition d’espaces résiduels offrant un abri aux regards. À cela s’ajoutent des aménagements urbains dissuasifs pour les sans-abri, aussi bien minéraux (conception de sols délibérément non-horizontaux, de revêtements bosselés, implantations de bornes, etc.) que végétalisés (haies basses pour laisser passer le regard, arbustes à épines ou à feuilles coupantes, etc.), dans lesquels prend place un mobilier urbain soigneusement étudié pour être indétournable (depuis les anciens bancs publics non remplacés jusqu’au nouveau mobilier rigoureusement calculé pour obtenir une assise individuelle inconfortable, sans possibilité de s’allonger). Il en va de même des abris-bus qui, outre une assise calculée en largeur et en longueur de façon à empêcher de s’allonger, comportent un côté ouvert où le vent et la pluie peuvent s’engouffrer à la fois pour faciliter la surveillance et limiter le confort.

Ces dispositifs matériels sont étudiés par des concepteur·rice·s et des designer·use·s[3], selon un cahier des charges précis et explicite. Ils sont produits par des entreprises qui les vendent aux municipalités et aux collectivités commanditaires en ventant leurs vertus socialement correctrices et sécuritaires. Les entreprises publiques, comme la RATP par exemple, ont leur propre service de conception. Ainsi qu’en témoigne Stéphanie Bouché[4], la cellule design de la RATP obéit à un cahier des charges qui intègre, depuis le début des années 1990, l’obligation de concevoir un mobilier indétournable par les « indésirables »[5]. Ce dernier terme, largement repris dans le discours sécuritaire, atteste d’un glissement idéologique entre l’obligation sécuritaire et la discrimination sociale. En l’absence de tout critère objectif énoncé, il désigne une catégorie de citoyen·ne·s anticipée comme potentiellement dangereuse. Sont ainsi pointé·e·s, sans les nommer explicitement, des citoyen·ne·s comme les SDF, les sans papiers, les Roms et autres errant·e·s urbain·e·s, qu’il s’agira d’écarter des centres-villes au profit de la présence des seul·e·s consommateur·rice·s.

Cet ostracisme est devenu banal et sa mise en place progressive n’a guère suscité les protestations des associations caritatives et humanitaires chargées de venir en aide à ces « indésirables ». Comme si se nouait ainsi, sur la base d’une entente tacite entre les chantres de la sécurité urbaine et ces associations, un pacte officialisant les thèses de la philanthropie dominante à la fois compassionnelle et répressive. Seuls les abus soulèveront quelques protestations de principe comme ce fut le cas lorsque Georges Mothron, maire (UMP) d’Argenteuil, était allé jusqu’à demander, en août 2007, l’utilisation d’un répulsif (le « Malodore », produit par la société Firchim) pour éloigner les SDF du centre commercial de sa commune. Devant le tollé général qu’avait suscité cette décision rendue publique par les agent·e·s municipaux·les qui avaient refusé d’utiliser ce produit, le Maire a fini par renoncer à ce projet. Dans cet ostracisme se donne à lire la liminarité[6] – l’éviction défensive que la société met en place envers ceux·lles qui ne sont plus lié·e·s à elle par un quelconque contrat social – que subissent ces « indésirables » alors que la société au sein de laquelle il·elle·s se trouvent ne peut les loger ou même les héberger et qu’elle n’accepte pas pour autant qu’il·elle·s investissent la rue et les espaces publics.

Il reste cependant difficile de cerner le marché que représentent ces nombreux dispositifs dissuasifs urbains. Il s’agit d’un sujet « sensible » par excellence et les mairies, les institutions et les entreprises publiques refusent tant de désigner les responsables de ces choix d’aménagements ségrégatifs que de communiquer leurs coûts. L’absence de transparence de ces marchés – pour la plupart – publics ne peut que questionner et témoigner d’un malaise issu de la contradiction manifeste entre des pratiques ségrégatives officielles et l’affirmation des grands principes républicains de liberté, d’égalité et de fraternité.  De fait, ceux·lles qui subissent au quotidien les effets de ces choix endossent l’infamie dont ils témoignent.  À la lumière de cette situation, il n’est pas sans intérêt maintenant d’analyser la place qu’occupent les SDF dans le dispositif d’aide qui leur est apportée.

Le marché de la pauvreté

La délégation par l’Etat, responsable de la cohésion sociale, d’une grande partie de la prise en charge des plus démuni·e·s au milieu caritatif et humanitaire a généré les conditions d’un véritable marché de la pauvreté[7]. Les financements octroyés, les formes de leur attribution – par appels d’offres – et la recherche de financements privés auprès des particulier·ère·s (dons et legs défiscalisés) et des entreprises (partenariats) ont fait surgir une situation de concurrence entre ces acteur·rice·s. Cette situation est celle d’un marché et de ses lois. En outre, cela a entraîné les acteur·rice·s privé·e·s de ce marché à faire corps dans la défense de ses modalités et enjeux face à l’Etat, créant ainsi un lobby particulier qui, au nom de l’aide aux plus démuni·e·s, est amené à défendre ses intérêts et ses acquis. C’est ainsi, par exemple, que lors de la canicule de 2003, l’ensemble de ces associations s’est aligné[8], un mois après, sur le chiffre totalement invérifiable et invraisemblable de moins de cinq décès de SDF consécutifs à cette canicule, chiffre avancé par Stéphania Parigi, directrice du Samu Social de Paris, fin août 2003[9]. Ce chiffre a dispensé l’ensemble de ces structures d’avoir à s’expliquer sur les défaillances en termes d’assistance lors de cet épisode de grande mortalité.

Dans le cadre de ce marché, les structures publiques du travail social sont mises en concurrence avec les associations caritatives et humanitaires lors des appels d’offres relatifs au traitement de l’ « urgence sociale ». Or,  la temporalité du travail social et sa professionnalisation – pour accompagner les personnes dans leur reconstruction – sont sans commune mesure avec celles de l’urgence et avec la compétence de bénévoles formé·e·s le plus souvent sur le tas. À cela s’ajoute pour le travail social une obligation d’évaluation des résultats, ce à quoi les associations caritatives et humanitaires ne sont pas strictement contraintes : tout au plus leurs comptes sont-ils soumis à la certification d’un·e commissaire aux comptes le·laquel·le vérifie rarement la véracité des chiffres sur le terrain.

Par ailleurs, en vertu de leur statut associatif, et parfois de leur caractère d’« utilité publique », les associations caritatives et humanitaires bénéficient d’une fiscalité attrayante relative aux dons et aux legs qu’elles s’emploient à collecter et aux partenariats qu’elles nouent avec les entreprises. Situation que ne connaît pas le travail social. Ces partenariats entre associations et entreprises, sous couvert d’un cadre éthique, autorisent et dynamisent l’alliance de firmes lucratives désireuses de bénéficier des attributs de la vertu sociale avec ces associations non lucratives qui jouent le rôle d’« entrepreneuses de morale » au sens où l’emploie Howard S. Becker[10]. S’y élaborent tant l’« éthique » que la « responsabilité sociale » dont les entreprises sont si friandes pour améliorer leur image sociale. Les alliances entre ceux·lles qui font du profit leur profession de foi et ceux·lles qui revendiquent celle de venir en aide aux plus pauvres ne sont pas si surprenantes. En fait, loin d’être paradoxales, elles se comprennent dans la mesure où les un·e·s et les autres donnent l’impression de partager le même postulat philanthropique quant au traitement de la pauvreté : remédier à ses effets sans toucher aux causes qui la produisent. Même si le terme de philanthropie est éclipsé par celui de « justice sociale », plus fédérateur et explicite dans ses exigences, même si la situation de concurrence exacerbe les rivalités, même si les références à l’éthique et à sa pratique sont sujettes à des oppositions, ces associations caritatives et humanitaires ne se décentrent point du postulat évoqué et du réformisme politique dont il témoigne.

Cependant, quand s’ajoute à ce qui précède l’observation de « glissements » des objectifs de ces associations vers l’acceptation d’actions de simple police à l’encontre des plus pauvres, surgissent d’autres questions. Ainsi, par exemple, l’éviction des SDF des quais de Seine[11] pour la mise en place saisonnière de « Paris Plage » ou encore celle des SDF du Bois de Vincennes[12], en réponse à des demandes municipales, ont-elles divisé le milieu caritatif associatif. Une association caritative et humanitaire doit-elle accepter ces missions qualifiées de « sensibles » par ce milieu lui-même? Les prises de position ont été très variables, depuis le refus, par certaines, de franchir cette ligne rouge jusqu’à son acceptation par d’autres, en discordance avec leur propre charte d’éthique. Certaines positions ont été contradictoires comme celle d’Emmaüs, par exemple, qui a refusé d’intervenir pour « Paris Plage » mais s’est chargé de l’opération du Bois de Vincennes. Le véritable problème est surtout le manque de transparence de ces choix envers les bénévoles, les donateur·rice·s et le public. Ces dissensions s’expriment dans l’entre soi inter-associatif des dirigeant·e·s, hors de tout débat public. Toutefois le chercheur, au gré des enquêtes de terrain, de la lecture d’articles et des échanges scientifiques en vient à mettre en lumière ces « missions sensibles » et les allégeances politiques qu’elles laissent supposer. En acceptant ces missions « sensibles », les associations participent in fine à un « nettoyage de la voirie » qui consiste à écarter les déchets sociaux que seraient les SDF.

Autre élément du traitement imposé aux SDF, l’Etat retarde toute évaluation possible des connaissances sur leur devenir. Ainsi, l’INSEE, sous sa tutelle, n’a toujours pas défini d’item SDF – alors que ceux·lles-ci existent depuis plus de vingt-cinq ans. Ceci permettrait, dans les statistiques de mortalité gérées par l’INSERM, d’isoler les SDF de l’ensemble des « inactif·ve·s » décédé·e·s dans lequel il·elle·s sont confondu·e·s[13]. Les chercheur·se·s de l’INSEE ayant d’abord allégué la difficulté éthique d’interroger ces personnes[14],  puis  le manque d’effectif pour y travailler[15]. Avec le temps, nous sommes passé·e·s d’une question d’éthique à une question de moyens. Nous pensons plutôt à l’absence de volonté politique et rejoignons en cela l’un des spécialistes de la mortalité à l’INSERM, qui nous disait en entretien : « S’il y avait une volonté politique, on pourrait suivre une cohorte de SDF jusqu’à extinction, ce qui nous donnerait des extrapolations possibles et intéressantes ». Pourquoi cette volonté n’existe-t-elle pas ?

Si aucune  statistique officielle ne permet de cerner la mortalité des SDF, aucune ne permet non plus de cerner leur réinsertion supposée. Or la réinsertion et la mort étant les seules sorties possibles de l’« exclusion »,  il devient impossible d’évaluer les effets du marché de la pauvreté. Ce dernier peut ainsi continuer à prospérer en laissant croire à son efficacité supposée.

Force est de constater que les SDF, à la lumière de ces analyses, en arrivent à occuper la place d’un alibi aussi bien éthique qu’économique justifiant les divers investissements économiques déployés en leur nom ou pour se protéger d’eux. Cependant, un pas de plus est nécessaire pour comprendre comment le marché place les plus démuni·e·s dans une logique de rentabilité où le recyclage des choses et des personnes prend tout son sens.

Recycleur·se·s malgré eux·lles

En analysant l’hébergement en urgence, l’alimentation ou encore l’offre de vêtements et les formes d’insertion qui sont proposées aux SDF, les divers éléments de cette logique de recyclage deviennent plus manifestes. Lors de la mise en place des dispositifs d’aide en « urgence sociale », avec la fondation du Samu Social de Paris le 22/11/1993, le choix des locaux nécessaires à la mise « à l’abri » des SDF s’est orienté vers le recyclage de nombreux bâtiments anciens, conçus à d’autres fins, rapidement réhabilités a minima. Cette logique ne porte pas, par son insuffisance en nombre de places, les effets attendus et de nombreux·ses SDF restent sur le pavé[16] : ainsi, selon la FNARS, « trois personnes sur quatre ayant appelé ce numéro (115), n’ont pas eu de propositions d’hébergement ». Par ailleurs, ces hébergements ne séduisent guère leurs utilisateur·rice·s. Les critères d’admission et de durée d’hébergement dans ces CHU (Centre d’Hébergement d’Urgence) sont en dérogation permanente avec un accueil qui devrait être aussi bien « inconditionnel » qu’« illimité ». Ces critères sont toutefois appliqués aux familles avec enfants au détriment des individus seul·e·s qui sont de plus en plus laissé·e·s à la rue. Une grande majorité de ces centres refuse l’accueil des chien·ne·s et, trop souvent, ils n’assurent pas une sécurité suffisante des biens et des personnes. La plupart témoignent du recyclage architectural d’anciens bâtiments effectué, lui aussi « en urgence », où les aménagements et les dispositions prennent mal en compte les besoins spécifiques des usager·ère·s. L’insuffisance du nombre de places – les 110.000 places en centre d’hébergement d’urgence (CHU et CHRS) sont toutes occupées – et l’augmentation constante des demandes – moins de 2.000 personnes en 2004, 11.000 en 2013 et 30.000 en 2014 – ont poussé les associations caritatives à avoir recours à l’hébergement hôtelier, créant ainsi un marché fort rentable pour les hôtelier·ère·s (voir encadré) qui coûte chaque année 1,3 milliard d’euros à l’Etat et augmente sans cesse[17]. Dès 2004, le Samu Social de Paris avait signé un accord avec le groupe Envergure, deuxième groupe européen de l’hôtellerie restauration qui regroupe Bleu marine, Kyriad, Campanile, Première classe, Nuit d’hôtel et Côte à côte, dont la vocation sociale mérite d’être interrogée[18].

« Même si tous ne sont pas des Ténardier en puissance et si le service qu’ils offrent est irremplaçable, beaucoup d’exploitants d’établissements low cost ont bien compris l’intérêt du dispositif : le tarif moyen de 17 euros par personne et par nuit leur assure un très bon résultat d’exploitation, d’autant que les chambres sont souvent sur-occupées. Leurs taux de remplissage sont excellents, leurs charges peu élevées car le ménage n’est pas fait tous les jours, les familles préfèrent parfois s’en occuper elles-mêmes », explique cet ancien dirigeant d’un grand réseau hôtelier. Il a vu progressivement augmenter le nombre des Formule 1, Eggs hôtels, Balladins, Park and Suites présents sur ce segment de marché. « Lors des grands Salons parisiens, ou en haute saison, ils troquent les familles contre des VRP ou des touristes à qui ils louent leurs chambres plus cher ».

Cette logique de recyclage est encore plus patente dans l’alimentation des SDF, multiforme en ce qu’elle emprunte tant à la récupération dans les poubelles des moyennes surfaces qu’à la soupe populaire[19]. Via les banques alimentaires livrant les associations sous contrat avec elles, les SDF permettent de valoriser les excédents alimentaires européens (sortis du marché pour maintenir les cours), les aliments donnés par la filière agro-alimentaire ou les grandes surfaces (pour défaut de packaging ou pour dépassement de date de vente) en contrepartie d’une défiscalisation sur leurs bénéfices, ou encore les denrées invendables sur le marché. Au nom de l’aide alimentaire et de la lutte contre le gaspillage s’est mise en place une logique dont l’Association Nationale des Industries Alimentaires (ANIA) a compris l’opportunité aussi bien économique qu’éthique et communicationnelle. À consulter son guide du don alimentaire[20], régulièrement mis à jour, il est aisé de comprendre que la logique s’accordant ainsi à la loi relative à la lutte contre le gaspillage du 12/02/2016 officialise le rôle des plus démuni·e·s dans ce recyclage, c’est-à-dire dans la valorisation économique d’aliments qui, sans cela, seraient des déchets. Ils assurent ainsi une meilleure performance économique mais aussi écologique de la société qui les produit. Enfin, il n’est pas inutile de remarquer que lorsque l’Europe ou l’Etat financent moins cette aide alimentaire, c’est à la société civile que les associations caritatives et humanitaires s’adressent lors des campagnes de dons dans les supermarchés. Ces derniers sont alors gagnants à double titre, puisque en plus de l’image de « solidarité » qu’ils affichent ainsi, ils encaissent les bénéfices de la vente des produits achetés pour ces dons.

Ce rôle de recycleur·se·s que notre société fait jouer aux plus démuni·e·s en matière d’alimentation est encore plus manifeste en ce qui concerne les vêtements. Les SDF, pour se vêtir, ont accès à des vestiaires où il·elle·s choisissent leurs vêtements parmi ceux collectés à cet effet par les associations caritatives. Il est en effet impossible d’entretenir ses vêtements lorsque l’on vit à la rue et, lorsque ces derniers sont sales, usés ou déchirés, il est plus simple de s’en dessaisir au profit de « nouveaux ». Ces vestiaires sont pourvus en vêtements donnés, récupérés par les associations caritatives au nom des plus démuni·e·s. Il s’agit très rarement de vêtements neufs ou jamais portés (issus par exemple d’achat d’impulsion). Ce sont essentiellement des vêtements rendus obsolètes par la mode ou usés. On trouve aussi des vêtements provenant de garde-robes de défunt·e·s qui, symboliquement, ne sont plus utilisables par les proches. Notons au passage que jusqu’au début des années 1960, la circulation de ces vêtements dans le cercle familial était appréciée. Elle est bien plus rare aujourd’hui, sans doute à cause de l’élévation du niveau de vie mais aussi du tabou de la mort qui s’est accentué et qui « pollue » ces vêtements. Les textiles collectés sont triés par des bénévoles et tout au plus 1% des 100 000 tonnes collectées (en 2005) aboutissent dans les vestiaires pour SDF. Le reste retrouve une valeur marchande, soit dans les friperies, qu’elles soient privées ou tenues par les associations caritatives, soit sur d’autres marchés dans les pays de l’Est et en Afrique. Les vêtements trop usés ou déchirés sont revendus à des industriel·le·s qui les défibrent pour en faire des serpillières ou des tapis de sol automobile, etc. Cette matière première gratuite, traitée dans sa majorité par des bénévoles (qui ne coûtent rien), laisse une marge bénéficiaire appréciable. Toutefois ceux·lles qui en bénéficient au nom des SDF n’utilisent pas ces revenus pour offrir, dans ces vestiaires, des chaussures neuves (bien le plus précieux lorsque l’on vit à la rue) et des ceintures (qui font cruellement défaut lorsque l’on trouve un pantalon à une taille supérieure à la sienne)[21].

En 2005, la fin des quotas d’importation textile en provenance de la Chine a mis en péril les bénéfices de cette récupération en France. Emmaüs (qui traitait 55% de ce marché avec 3 000 emplois précaires créés) a alors déposé, en 2007, un amendement permettant d’instaurer une taxe sur les vêtements neufs[22]. Cette proposition a été retoquée par le Sénat. S’en est suivie une concertation entre les organisations caritatives impliquées dans la récupération concurrentielle des textiles, les organisations professionnelles et l’Etat (soucieux de rationaliser dans le sens d’un développement durable ce marché anarchique). À l’issue de ce processus qui visait à mettre en place une économie circulaire dans ce secteur, la récupération textile au nom des pauvres a laissé la place à des arguments plus porteurs : l’écologie et l’économie sociale et solidaire. C’est dans le cadre de cette dernière – qui n’est pas à confondre avec un service public puisqu’elle attribue au profit une fonction sociale et qu’elle draine beaucoup des aides sociales relatives à la création d’emplois – que s’épanouissent nombre d’associations et de sociétés « greenwashées », parées de vertu sociale. Le champ des emplois créés dans ce secteur commence juste à être défriché[23]. Le milieu associatif caritatif, surtout catholique, est ainsi devenu leader sur ce marché en expansion et très concurrentiel (400 000 tonnes de récupération potentielle de textiles par an) que le·la consommateur·rice, sans le savoir, subventionne deux fois : une première fois en donnant les vêtements et accessoires vestimentaires dont il·elle se débarrasse, une seconde fois lors de ses achats de vêtements, chaussures, etc., dont les prix incluent le coût du recyclage (répercuté par les industriel·le·s et commerçant·e·s de ce secteur). Quant à la majorité des SDF qui n’ont pas trouvé à être réinséré·e·s dans les activités de recyclage de ces vêtements, il·elle·s continuent de s’habiller dans les vestiaires contribuant ainsi à  recycler ces rebuts.

Assignation symbolique et sociale

Comme on vient de l’évoquer à travers ces divers champs, dans la prise en charge dont il·elle·s sont l’objet, les SDF apparaissent captif·ve·s d’une assignation symbolique et sociale aux déchets. Cette dernière génère également des financements – auxquels s’ajoutent des emplois et des défiscalisations consenties par l’Etat. En effet, au-delà des bénévoles et des « petites mains » qui interviennent sur le terrain et reçoivent des salaires basiques, les organigrammes des associations caritatives témoignent d’un nombre conséquent d’emplois situés au « sommet » de ces structures et largement rétribués. Malheureusement, en dehors de rares confidences, il reste difficile, pour le chercheur, d’accéder aux émoluments précis des cadres, ceux-ci étant, dans les rapports officiels, noyés dans une masse salariale globale. Pas plus d’informations en interne d’ailleurs, les bénévoles sont soigneusement tenu·e·s à l’écart de cette question. Cette absence de transparence n’évacue cependant pas totalement les interrogations surgissant à propos  des « chargé·e·s de mission » – poste à la définition aussi floue que variable – dont les compétences restent aussi obscures que leurs liens avec le champ politique sont établis. Ces postes sont d’autant plus attirants qu’ils sont vertueux. On peut souligner, en reprenant les thèses de Mary Douglas[24], que ce trop-plein de « pureté » s’attachant à ceux·lles qui aident officiellement les SDF n’a d’égal que le trop-plein d’« impureté » s’abattant sur ces dernier·ère·s. Impures mais ô combien utiles et nécessaires pour justifier l’économie qu’il·elle·s génèrent et garantir la vertu de ceux·lles qui leur viennent en aide !

Ainsi, notre société ne peut qu’être solidaire des plus démuni·e·s qu’elle produit et il est à redouter que cette solidarité intéressée justifie la pérennisation de leur situation. Quant à eux·lles, pour la plupart, il·elle·s sont promis·es, comme individus, à une mort prématurée[25]. D’ailleurs notre société maîtrise, pour ceux·lles dont les corps ne sont pas réclamés, leur recyclage final : les caveaux à décomposition rapide du cimetière parisien de Thiais et l’incinération de leurs restes au bout de cinq ans, en sont les étapes techniques[26]. Tout est donc bien en place pour donner aux SDF, dans le champ symbolique, la place permettant de justifier une économie « sociale » à leur propos. On voit ainsi comment le champ symbolique peut nourrir le champ économique grâce à l’escamotage que les représentations dominantes font de cette liaison. Cette situation est-elle nouvelle au regard de l’histoire ou bien s’inscrit-elle dans une continuité historique du traitement des plus pauvres par la société ? L’exploration de cette perspective n’est pas sans intérêt pour saisir, après avoir étudié la dimension synchronique de ces faits sociaux, leur insertion dans une dimension diachronique.

Continuités historiques et discontinuités apparentes

Si, au Moyen Age, le·la pauvre avait une place essentielle en ce qu’il·elle permettait au·à la riche qui l’aidait de gagner sa rédemption[27], aujourd’hui a succédé un·e pauvre utile à la performance durable (comme le développement « durable ») du capitalisme. Grâce à cet usage des plus pauvres, une logique de production et d’exploitation fondée sur le profit peut se parer d’attributs moraux.

De la même manière, l’histoire nous enseigne la continuité d’autres caractères : si déjà au Moyen Age, les viandes suspectes, écartées pour des raisons sanitaires, étaient données aux plus pauvres qui recyclaient ces invendables[28], cette logique perdure jusqu’au XIXème siècle où échouent sur les tables des plus démuni·e·s les restes plusieurs fois recyclés des nourritures des plus riches[29]. Au cours du XXème siècle, ce sont encore ces restes alimentaires que les gens de maison prendront la peine de déposer, pliés dans du journal, sur les ordures, dans les poubelles des beaux quartiers parisiens, pour nourrir les chiffonnier·ère·s. Bien que la dangerosité alimentaire des rebuts donnés aujourd’hui aux plus démuni·e·s soit bien moindre qu’antérieurement, l’esprit reste le même. Les SDF l’ont bien compris, dans la peur récurrente qu’ils ont d’être empoisonné·e·s en fréquentant les gargotes caritatives, où des soupes[30] faites d’assemblages divers les font s’interroger sur le contenu, la provenance et les dates de péremption des produits entrant dans leur composition. Il faut toutefois remarquer qu’en dehors de ces cas le recours, dans de nombreux centres d’accueil, aux plateaux-repas ou au self-service a pondéré leurs inquiétudes. Cependant, nourrir des personnes en les laissant à la rue n’est pas chose aisée. L’idéologie philanthropique a même tenté, en 2002 avec le Vita-Poche[31] (aliment énergétique chocolaté enrichi en vitamines, présenté sous forme de pâte emballée dans un film d’aluminium étanche, élaboré par la société Nutriset et vendu aux institutions humanitaires), de réaliser le vœu des philanthropes du XIXe siècle de concevoir une gelée nutritive pour les nécessiteux·ses. Devant le refus des SDF de s’en nourrir, cette tentative a avorté. S’est alors instituée une surveillance purement nutritionnelle (en dehors du caractère gustatif) de l’alimentation des SDF par le ministère de la Santé, pour pallier le déficit en fruits et légumes frais, par des supplémentations vitaminiques diverses et systématiques incorporées dans l’alimentation distribuée. Cette attention exprime les limites de la considération portée à ces personnes à la rue, sur le plan alimentaire, alors que la plupart seraient à même d’assumer leurs choix alimentaires et la cuisine permettant de les préparer, si du moins elles étaient logées.

D’autres faits pourraient apparaître historiquement comme des discontinuités. Ainsi, la disparition du délit de vagabondage depuis 1994 (et sa suppression du Code pénal) peut passer pour une rupture historique essentielle. Or, en y regardant de plus près, la surveillance des plus démuni·e·s a considérablement augmenté : aux effets de la logique de prévention situationnelle évoqués plus haut, sont joints l’œil des caméras de surveillance, les patrouilles de police et même les maraudes caritatives nocturnes (qui, au prétexte de réveiller les SDF pour un bol de soupe et un quignon de pain dont il·elle·s n’ont guère besoin, assurent une surveillance gratuite de ces populations urbaines en liaison avec le 115, numéro d’appel du Samu social). Tou·te·s ces intervenant·e·s, relié·e·s par radio ou téléphone, participent du même plan cynégétique urbain relatif aux populations marginales. La société surveille donc étroitement ses marginaux·ales et se donne aussi un cadre légal provisoire – à travers les arrêtés municipaux d’interdiction de la mendicité, d’interdiction de rassemblement ou encore de possession de chien·ne·s non tenu·e·s en laisse[32] – pour se prémunir contre eux·lles.

Une autre discontinuité historique discutable est celle des soins apportés aux SDF : l’octroi de la Couverture maladie universelle (CMU), votée en 1999 et mise en place en 2000, semble avoir rompu, en matière de santé, avec l’ostracisme que subissaient jusque-là les plus démuni·e·s. Cette loi facilite leur accès aux soins, dont les coûts sont pris en charge par la CMU. Dans la pratique, l’efficacité de cette loi est mise à mal par nombre de praticien·ne·s qui, bien qu’étant assuré·e·s d’être payé·e·s par la CMU et la CMUC (Couverture maladie universelle complémentaire), refusent ou dissuadent les SDF de fréquenter leurs cabinets[33] (voir encadré).

Une étude réalisée en 2009 pour le fond de financement de la CMU, rapporte en effet qu’à Paris, 25,5% des médecins libéraux refusent d’accueillir les bénéficiaires de ces aides. Ce refus concerne 9,2% des omnipraticien·ne·s du secteur 1 (honoraires égaux au tarif de remboursement de la Sécurité Sociale) et 32,6% des omnipraticien·ne·s du secteur 2 (honoraires libres). Les chiffres sont encore plus élevés dans certaines spécialités : on retiendra que 40,2% des gynécologues du secteur 2 refusent les bénéficiaires de la CMU[34].

Comme les sanctions du Conseil de l’Ordre à l’encontre de ces dernier·ère·s ne dépassent pas le rappel à la loi, il y a fort à parier que cette situation perdure, hypothéquant en partie la discontinuité historique que cette loi aurait pu faire surgir et qui n’a entraîné que des améliorations limitées. De fait, globalement, les SDF sont l’objet de soins « vétérinaires » (selon l’expression d’une bénévole) en ce que les soignant·e·s oublient délibérément leurs conditions de vie. Après les soins, il·elle·s se retrouvent à la rue avec des prescriptions inobservables comme ne pas associer l’alcool à certains médicaments ou porter attention à une hygiène quotidienne stricte relativement à certaines plaies risquant de s’infecter et dont il faut refaire le pansement souvent. C’est méconnaître la réalité de la vie à la rue et se méprendre sur un espoir d’avenir que nombre d’entre eux·lles ont abandonné. Même s’il semble que, globalement, la morbidité des SDF soit moins catastrophique qu’il y a vingt ans en termes de pathologie aiguës, car ces pathologies semblent mieux repérées et plus tôt, il n’en demeure pas moins que leur santé n’est guère florissante et que leur espérance de vie reste très inférieure à l’espérance de vie moyenne nationale : leur âge moyen au décès en 2015 était de 49 ans contre 82 ans[35] pour le reste de la population.

L’enseignement de l’histoire montre donc, à propos des plus démuni·e·s, que la société entretient des attitudes témoignant de continuités, au détriment de discontinuités volontaristes restant toujours tempérées par la constance des représentations de « classe » qui perdurent envers ces sous-prolétaires. Louis Sébastien Mercier, cité dans la thèse de Cyrille Harpe[36], ne s’exclame-t-il pas[37] : « Oh, si la pelle du boueur pouvait mettre dans le même tombereau toutes ces âmes de boue qui infestent la société, et les charrier hors de la ville, quelle heureuse découverte, et combien elle serait précieuse à la police ! ». Tout est dit.

Conclure

Au terme de ce cheminement, force est de constater que, au-delà des représentations dominantes, une autre manière d’analyser la position des SDF – et le rôle que notre société leur fait jouer – est possible. Dans les entrelacements du symbolique et de l’économique, les plus pauvres sont devenu·e·s, par le recyclage des biens et des personnes, la rédemption économique de la logique économique et sociale qui les produit. Y trouvent-il·elle·s leur salut ? Construisent-il·elle·s une identité sociale, dont la maîtrise des déchets les décalerait de la pollution symbolique que ces derniers diffusent ? Jusqu’à présent, selon Mary Douglas, la souillure et l’impureté des déchets ont toujours contaminé celui·le qui en fait usage, le·la confondant avec ces derniers.

[1] D. Terrolle, « La ville dissuasive ou l’envers de la solidarité envers les SDF », Espaces et Sociétés, 116-117, 2004, p. 143-157.

[2] A. Wyvekens (dir.), « Espace public et sécurité », Problèmes politiques et sociaux, 930, 2006 ; K. Sallière, « Interroger le statut de l’espace dans la définition et la résolution de l’insécurité », Master Innovation et Territoire, Université Joseph Fourier, 2012, www.resovilles.com/pages/nos-rendez-vous/prevention et tranquilite publique/prevention -situationnelle.php ; B. Benbouzid, « Urbanisme et prévention situationnelle : le cas de la dispute des professionnels à Lyon », Métropoles, 8, mis en ligne le 17 décembre 2010, http://metropoles.revues.org/4391.

[3] www.urbanews.fr/2013/12/06/37382-ville-rigide-ville-securitaire-quand-les-bancs-publics-crees-des-exclusions/

[4] S. Bouche, « Concevoir l’assise implantée sur les quais du métro », Les annales de la recherche urbaine, 88, 2000, p. 77-81.

[5] D. Terrolle, « La ville dissuasive… », art. cit.

[6] D. Terrolle, « La liminarité des SDF. Rites de ségrégation et procédure sacrificielle », Le Nouveau Mascaret, 36, 1995, p. 9-14.

[7] D. Terrolle, « Gérer les pauvres », TSANTSA, Revue de la Société Suisse d’Ethnologie, 11, 2006, p. 13-21.

[8] Par exemple, Emmaüs, dans son bulletin en ligne « La quinzaine » (n°400, 15/09/2003) ne se réfère à aucun chiffre et affirme, sans le démontrer, que pour les SDF «  la surmortalité a pu être évitée », mais annonce la nécessité de mettre en place à l’avenir un « plan grand chaud » estival. D’autre part, l’association « Les Morts de la rue », curieusement, est restée totalement mutique à propos des décès de cette canicule.

[9] Le Monde, 27/08/03, p. 10.

[10] H. S. Becker, Outsiders. Etudes de sociologie de la déviance, Paris, Métailié, 1985 (1963).

[11] E. Gardella, « Au rythme de l’accompagnement. L’expérience éthique du travail de rue dans l’urgence sociale », in C. Felix, J. Tardif (did.), Actes du colloque international « Actes éducatifs et de soins, entre éthique et gouvernance », Nice, 4-5 juin 2009, mis en ligne le 01 Octobre 2010 : http://revel.unice.fr/symposia/actedusoin/index.html?id=558.

[12] G. Lion, « Des hommes, des bois. Déboires et débrouilles. Ethnographie des habitants du Bois de Vincennes », master 2 TES, EHESS, 2012 : http://www.caf.fr/etudes-et-statistiques/dossiers-d-etudes.

[13] D. Terrolle, « La mort des SDF à Paris : un révélateur social implacable », Etudes sur la mort, 122, 2002, p. 55-68 ; D. Terrolle, « Sans-logis : une mort rendue invisible », in D. Ballet (dir.), Les SDF. Visibles, proches, citoyens, Paris, Presses universitaires de France, 2005, p. 157-165.

[14] J.-M. Firdion, M. Marpsat, M. Bozon, « Est-il légitime de mener des enquêtes statistiques auprès des sans-domicile ? », in M. Marpsat, J.-M. Firdion (dir.), La rue et le foyer, Paris, Presses universitaires de France/INED, 2000.

[15] http://www.penombre.org/Vie-et-mort-dans-la-rue.

[16] http://www.lemonde.fr/societe/article/2012/10/31/dans-le-plus-grand-centre-d-accueil-de-france-les-sdf-tentent-d-oublier-la-rue_1781684_3224.html

[17] http://www.lesechos.fr/04/12/2014/LesEchos/21828-049-ECH_le-puits-sans-fond-de-la-politique-d-hebergement.htm

[18] Politis, 16/12/2004.

[19] C. Amistani, D. Terrolle, « L’alimentation des SDF : entre autonomie et dépendance », Anthropology of food, 6, 2008 : http://aof.revues.org/document 4952.html.

[20] http://www.ania.net/alimentation-sante/guide-don-alimentaire.

[21] D. Terrolle, « Gérer les pauvres », art. cit.

[22] http://www.liberation.fr/futurs/2005/12/15/bataille-de-chiffonniers-autour-de-l-amendement-emmaus_541907.

[23] Cf. les travaux en cours de Delphine Corteel sur ce thème, et D. Corteel, S. Le Lay, Les travailleurs des déchets, Toulouse, Eres, 2011.

[24] M. Douglas, De la souillure. Essai sur les notions de pollution et de tabou, Paris, La Découverte, 1992 (1967).

[25] Cf. à ce propos www.lesmortsdelarue.org.

[26] D. Terrolle, « Recyclages », Etudes sur la mort, 136, 2010, p. 95-101.

[27] B. Geremek, La potence ou la pitié. L’Europe et les pauvres du moyen-âge à nos jours, Paris, Gallimard, 1987.

[28] M. Ferrières, Histoire des peurs alimentaires. Du Moyen Âge à l’aube du XXème siècle, Paris, Le Seuil, 2002.

[29] J.-P. Aron, Le Mangeur du XIXe siècle, Paris, Robert Laffont, 1973.

[30] Ch. Violette-Bajard, Visages de la pauvreté, Lyon, Editions Chroniques sociales, 2001.

[31] N. Darmon, C. Lécossais, A. Briend, « Comment améliorer l’aide alimentaire destinée aux personnes sans abri ? Acceptabilité d’un aliment de rue enrichi », Médecine et nutrition, 39/1, 2003, p. 1-8.

[32] http://www.ladepeche.fr/article/2011/07/25/1134194-sdf-remis-en-place.html

[33] Y. Benoist, D. Terrolle, « Biomédecine, grande pauvreté et domination sociale : Job et les vétérinaires », Illusio, 8-9, 2012.

[34] P.-E. Couralet, C. Després, S. Guillaume, Le Refus de soins à l’égard des bénéficiaires de la Couverture maladie universelle complémentaire à Paris, Institut de recherche et documentation en économie de la santé, 2009.

[35] Cf. le site déjà évoqué en note 25.

[36] C. Harpet, Du déchet : philosophie des immondices. Corps, ville, industrie, Paris, L’Harmattan, 1998.

[37] L.-S. Mercier, Tableau de Paris. Les boueurs, Mercure de France, T.1, 1782-1788, p. 1238 (réédition 1994).