Laurent Lévy revient sur le jugement du tribunal de Lille qui, par-delà le thème vendeur de la virginité, traduit surtout un retour en force de la sacralité institutionnelle du mariage.
Jusqu’à la réforme du Code pénal en 1992, le fait pour un ministre du culte de célébrer le mariage religieux de personnes qui n’étaient pas mariées civilement était considéré, à la deuxième récidive, comme un acte criminel, passible de la Cour d’Assises. C’est dire l’étrange importance accordée par une République prétendue laïque à l’institution, ainsi sacralisée, du mariage civil.
Il y avait bien sûr un fondement, historique, idéologique et politique, à une telle sacralisation. Dans une société fortement patriarcale, comme l’était assurément la France catholique à l’époque du Code civil (1805), le mariage était considéré avant tout comme une institution fondamentale à l’équilibre social. La femme mariée s’y trouvait sous la quasi-tutelle de son mari ; elle n’avait ainsi aucun pouvoir d’administrer ses propres biens, le reste à l’avenant. Le mariage garantissait la légitimité des filiations, et évitait la dispersion des héritages. En un temps où il est de bon ton de qualifier de moyenâgeuses de telles règles, il n’est pas inutile de rappeler que c’est seulement dans les années soixante-dix du vingtième siècle que les femmes mariées ont pu librement, en France, accomplir un acte aussi banal qu’ouvrir un compte en banque à leur nom. Et que c’est seulement, à l’extrême fin de ce même siècle, et sous la pression de la Cour Européenne des Droits de l’Homme, que le droit des « enfants adultérins » (étrange expression technique qui désigne ceux que plus grand monde ne songe à stigmatiser comme « bâtards ») à hériter comme les autres de leurs deux parents a été reconnu par la France républicaine. De cette institution « moyenâgeuse », la République a toujours voulu garder le contrôle. Or, le mariage civil était, au début du XIXe siècle, sans grande portée sociale. Pour l’immense majorité des gens, se marier était contracter un mariage religieux. C’est à l’Église, non à la Mairie, que l’on se mariait. Maintenir la possibilité de le faire sans passer préalablement par la Mairie aurait été condamner le mariage civil aux situations anecdotiques de couples prêts à défier l’ordre social dominant, et acceptant d’être socialement considérés comme couples non-mariés. La toute-puissance de l’Etat, sa mainmise sur l’état civil, supposait donc que l’alliance conservatrice du Sabre et du Goupillon soit assurée, y compris par cette intervention autoritaire de la République dans les affaires de l’Église, l’interdiction pénalement sanctionnée de célébrer le mariage religieux de couples civilement célibataires.
Le grand succès de la mainmise républicaine sur le mariage a d’abord été l’acceptation sociale équivalente des couples mariés de manière seulement civile avec ceux qui continuaient la tradition du mariage religieux – à tel point que l’Église en est venue à prohiber le divorce civil, pourtant sans effet sur le mariage religieux : comme une réponse du berger à la bergère.
Le mariage civil avait ainsi maintenu le double caractère du mariage religieux ; il était certes une relation de nature contractuelle entre les époux, c’est à dire le fruit de leur échange de consentement, mais demeurait en même temps et surtout une institution – équivalente laïque du « sacrement » religieux.
La sacralité institutionnelle du mariage semble pourtant avoir au fil des décennies pris un coup de vieux, avec les évolutions des mœurs d’une part, et celles, à certains égards subséquentes, de la législation d’autre part. La famille traditionnelle, stable et définitive, dûment enregistrée par le Maire et éventuellement bénie par le Prêtre, a petit à petit cessé d’être une norme absolue, un pilier essentiel de l’ordre social. Le divorce, initialement enfermé dans des conditions drastiques, et un temps purement et simplement supprimé du Code civil, a connu à partir des années soixante-dix du vingtième siècle des aménagements considérables, dont le plus important a d’abord été la reconnaissance d’un droit à divorcer par consentement mutuel. Seul le divorce pour « faute » était jusqu’alors possible, si bien que deux époux n’ayant rien d’autre à se reprocher que le fait qu’ils ne voulaient plus vivre ensemble étaient contraints à feindre des « fautes » imaginaires, et à trouver un juge complaisant qui ne serait pas trop exigeant sur la validité des preuves fournies. C’est la grande époque du « constat d’adultère », où les huissiers se rendaient à potron-minet dans des chambres d’hôtel pour y surprendre, tantôt maris volages en compagnie de dames de petite vertu, tantôt épouses oublieuses de leurs devoirs conjugaux entre les bras d’écornifleurs.
Le divorce par consentement mutuel a constitué une véritable révolution, condamnée comme telle par la fraction la plus réactionnaire de la doctrine juridique et du corps législatif. Le double caractère, contractuel et institutionnel, du mariage était nettement infléchi du côté du contrat. Ce que la volonté des époux avait pu faire, elle pouvait désormais le défaire. Une disposition permettait même un divorce unilatéral, dans des conditions particulières et avec certaines limites : un époux pouvait obtenir le divorce après une séparation de fait de plus de six ans. C’est certainement la disposition qui, lors de la grande réforme du divorce, a suscité le plus d’opposition ; on y voyait en effet – non sans raison – l’introduction en droit français du principe de la répudiation – en oubliant que cette procédure permettait aussi bien à une femme de répudier son mari que l’inverse. La dernière réforme du divorce a réduit à deux années le temps de séparation de fait nécessaire pour obtenir le divorce de manière unilatérale, et supprimé les cas d’impossibilité. Le mariage devient dès lors un contrat à durée indéterminé presque comme les autres, auquel il est toujours loisible aux parties de mettre fin. Son caractère institutionnel est ainsi réduit à peu de chose. En outre, au fil de ses nombreuses réformes, le droit du mariage lui-même a perdu son caractère essentiellement patriarcal, et la fin du vingtième siècle a vu enfin disparaître les dispositions légales qui établissaient une différence de droit entre hommes et femmes dans le mariage.
Le relatif effacement du caractère institutionnel du mariage est d’autant plus notable que les évolutions juridiques ont accompagné celles des mœurs. On a pu dire sans risque de se tromper que tous les mariages se terminaient par un divorce – sauf le cas où l’un des époux venait à mourir auparavant. La première hypothèse est désormais de plus en plus fréquente. Les mariages durent rarement pour la vie. Le nombre des naissances hors mariage est en outre devenu, sinon une norme, du moins une situation habituelle, à laquelle ne s’attache plus aucune réprobation sociale. L’expression « fille-mère » a disparu du vocabulaire, et les ménages monoparentaux sont devenus des plus classiques. Et si les familles se décomposent, elles se recomposent également de toutes les manières imaginables. Si l’on ajoute à ce panorama la création du Pacs, l’abolition de toute différence de droit entre « enfants naturels » et « enfants légitimes », la multiplication des cas dans lesquels les concubins se voient reconnaître les mêmes droits que les couples mariés, la reconnaissance jurisprudentielle du viol entre époux, l’action en recherche de paternité, l’émergence de la famille homoparentale, ainsi que la revendication au succès désormais inéluctable du mariage homosexuel, on pourrait en conclure que la question du mariage a perdu l’essentiel de ses enjeux traditionnels, auxquels les rédacteurs du Code civil originel étaient si attachés : une évolution dont il y a lieu de se féliciter.
Comment dès lors l’annulation judiciaire d’un mariage, demandée par le mari et prononcée par le t
ribunal avec l’accord de la femme, a-t-elle pu provoquer un tel tollé ? Un simple jugement du tribunal de grande instance de Lille, daté du 1er avril 2008, a suscité plus de réactions dans le grand public, et parmi les élites autoproclamées des médias et de la politique, qu’aucune autre décision de justice depuis bien longtemps. De l’UMP au parti communiste, le la Ligue des Droits de l’Homme à Ni Putes Ni Soumises, on a hurlé au scandale. Il est vrai qu’il y avait de quoi pimenter le débat, puisque les personnes concernées étaient d’origine maghrébine, et qu’était en cause le thème médiatiquement vendeur de la virginité.
Il semble que la plupart des commentaires indignés ont commencé par une ignorance totale du jugement en question, comme si l’on pouvait comprendre et commenter une décision de justice sans même l’avoir lue. Ainsi, a circulé dans certains milieux féministes un courrier électronique proposant « qu’un texte soit rédigé dénonçant cette décision et se solidarisant avec la jeune femme ». Les rédactrices de ce courrier, si elles avaient essayé d’en savoir plus et s’étaient vraiment intéressées à la personne à qui elles entendaient manifester cette solidarité, auraient su que la jeune femme en question était d’accord avec la décision prise, si bien que la première « solidarité » avec elle aurait sans doute été de ne pas la « dénoncer ». Un groupe se proposait même de la soutenir « jusqu’à la cour de cassation ». Et pourquoi pas jusqu’à la Cour Européenne des Droits de l’Homme ? Il n’y avait même pas d’appel de la part d’une femme qui avait acquiescé à la demande. La soutenir aurait été acquiescer avec elle.
Si les réactions suscitées par ce jugement sont certainement plus intéressantes que le jugement lui-même, il n’est pas inutile pour autant d’y regarder de plus près. De quoi s’agissait-il donc ? D’une procédure relativement rare : une demande en annulation de mariage.
Parce que le mariage, même considéré comme une institution plus ou moins sacrée, a toujours eu un aspect contractuel, une action judiciaire en annulation a toujours été ouverte. Lorsque le divorce n’existait pas – ainsi dans l’ancien droit, où le mariage était régi par les règles religieuses – l’annulation était même le seul moyen de mettre fin à un mariage. Le principe juridique est celui des vices du consentement : dans la mesure où la validité d’un mariage est soumis au consentement des époux (qui doivent, devant témoins, répondre « oui » à la question de l’officier ministériel, qu’il soit le Maire ou le Prêtre), il importe que ce consentement soit valide. Dans le droit commun des contrats, les vices du consentement peuvent être de trois ordres : la violence, l’erreur et le dol.
Il y a violence lorsque l’un des contractants est sous l’effet d’une contrainte, qui peut être physique ou morale, et qu’elle soit provoquée un tiers ou par son cocontractant. Un célèbre exemple de contrainte en matière de mariage, souvent cité dans les recueils de jurisprudence, est celui d’un fiancé menacé de mort par son beau-père s’il n’épousait pas la fille qu’il avait « déshonorée ». L’histoire se passait en Corse. Un mariage n’est pas valable s’il est contracté sous la menace d’une arme à feu. Les « mariages forcés » peuvent ainsi, par définition, être annulés pour cause de violence.
L’erreur, pour fonder l’annulation d’un contrat, doit traditionnellement porter soit sur la « substance », ou les « qualités substantielles » de l’objet du contrat, soit – dans le cas des contrats dits intuitu personae, c’est à dire dans lesquels la personne du cocontractant présente une importance particulière – sur cette personne. Une vente peut être annulée parce qu’on a cru acheter un original, et qu’on n’a en fait acheté qu’une copie. Un bail peut l’être parce qu’on a cru louer à un millionnaire, et qu’on a loué à un SDF. Il importe peu dans ce cas que le SDF n’ait rien fait pour se faire passer pour millionnaire, ni que quant à lui, il considère son propre consentement comme parfait. Il suffit que le consentement d’une des parties soit vicié, – en l’espèce, celui du bailleur sans même que l’autre y soit pour quoi que ce soit. Ainsi va la vie. Dans le cas du mariage, il est difficile de distinguer l’objet du contrat de la personne du cocontractant. Dans les premières interprétations jurisprudentielles du texte initial du Code civil, l’erreur sur la personne n’était retenue dans cette matière, que si elle concernait son identité : j’ai cru épouser tel homme, et j’ai épousé son frère ; le mariage est nul. Mais si j’ai épousé un homme que je croyais irréprochable, en ignorant qu’il sortait du bagne, cela n’est pas une erreur sur la personne, et le mariage ne peut être annulé. La loi a été précisée pour rendre possible l’annulation d’un mariage dans une telle hypothèse, et c’est ce qui a abouti au texte actuellement en vigueur, admettant l’erreur sur la personne comme un vice du consentement dès lors que l’erreur porte sur une « qualité essentielle » de ladite personne (les juristes ne sont pas toujours philosophes, et en l’occurrence, les expressions « qualité essentielle » et « qualité substantielle » sont synonymes).
Sur ce fondement, ont été annulés de nombreux mariages pour les « erreurs » les plus diverses, dès lors qu’il était acquis aux débats que les « qualités » concernées étaient « essentielles » pour l’un au moins des conjoints. Les recueils de jurisprudence citent ainsi l’annulation obtenue par une femme parce qu’elle croyait que son mari n’avait jamais été marié, alors qu’il était divorcé ; ou qu’elle le croyait respectable alors qu’il était repris de justice. Ou l’annulation obtenue par un mari parce qu’il croyait son épouse de « bonne moralité » alors qu’elle était une ancienne prostituée. Ou celle obtenue par l’un des époux qui croyait son conjoint fertile alors qu’il était stérile ; ou qui le croyait apte à des relations sexuelles « normales » ( ?) alors qu’il souffrait d’une malformation physique. A même été annulé à sa demande le mariage d’une personne qui croyait avoir épousé un conjoint en bonne santé alors qu’il était porteur du VIH… Ce dernier cas n’a suscité aucune réprobation publique, aucune condamnation médiatique, aucune remarque ironique ou désabusée, aucune injonction au Garde des Sceaux d’interjeter appel, aucune proposition de loi.
Quant au dol, il correspond à la « tromperie », aux manœuvres plus ou moins frauduleuses d’un contractant pour conduire l’autre à donner son consentement, que ce soit en l’induisant en erreur, ou en le conduisant à une mauvaise appréciation de la portée ou de l’objet du contrat. Le dol est un vice du consentement qui n’est en principe pas retenu en matière de mariage, non pas en vertu d’un texte, mais en vertu d’un adage de l’ancien droit, exprimé par le jurisconsulte du 16e siècle Loysel sous la forme suivante : « En mariage, trompe qui peut ».
Dans l’affaire jugée par le tribunal de Lille le 1er avril dernier, l’erreur avait porté sur le comportement passé de l’épouse, dont le mari croyait, parce qu’elle le lui avait dit, qu’elle n’avait jamais eu de liaison amoureuse. L’aveu, le soir même des noces, d’une telle liaison antérieure, avait déterminé le mari dans l’idée qu’il s’était trompé sur ce qui constituait pour lui être une qualité essentielle de sa nouvelle épouse : sa virginité.
Qu’une femme catholique apprenne le soir de ses noces que son mari, qu’elle croyait vierge, avait eu une liaison et commis le péché de chair avant son mariage, et qu’elle demande en conséquence l’annulation de celui-ci, aurait peut-être fait sourire, voire suscité quelques blagues bien gauloises, dans le goût des contes et fabliaux de notre Moyen-âge. Mais que le tribunal, constatant l’acquiescement du mari, accède à sa de
mande, n’aurait sans doute pas fait couler autant d’encre et de salive que la décision rendue à Lille, entre deux jeunes mariés de confession ou de tradition musulmane.
Il est certes permis de discuter le bien fondé juridique du jugement de Lille, mais son opportunité ne fait pour autant guère de doute. L’épouse ayant acquiescé à la demande, reconnaissant ainsi le bien fondé des moyens invoqués par le mari (il ne s’agit pas là d’une interprétation psychologique, mais d’une règle de droit, bien connue de l’avocat de la jeune femme comme du juge…) et manifestant sans équivoque sa volonté de voir son mariage annulé, reprocher au juge d’avoir statué comme il l’a fait revient à lui dire : « bien qu’elles n’aient jamais vécu ensemble depuis maintenant deux ans qu’elles sont mariées, bien qu’elles souhaitent l’une et l’autre tourner la page, bien qu’elles considèrent l’une et l’autre que leur mariage est nul pour vice du consentement du mari, vous auriez dû condamner ces deux personnes à rester mariées ». Aussi contraire soit-elle à l’intérêt de l’un et l’autre justiciable, l’homme comme la femme, une telle décision n’aurait pourtant pas été impossible ; alors que l’accord des parties lie le juge dans d’autres matières, et en particulier en matière purement contractuelle, l’évolution du mariage dans cette direction n’en a pas totalement supprimé le caractère institutionnel. La matière est toujours « d’ordre public », c’est à dire que la liberté contractuelle n’y est pas totale. Le Code civil le dit expressément : « On ne peut déroger par des conventions particulières aux lois qui intéressent l’ordre public et les bonnes mœurs ». Il n’est pas anecdotique de constater le parallèle qu’introduit la loi entre « l’ordre public » et la police des « bonnes mœurs ».
À s’en tenir à l’interprétation classique des textes, la solution retenue par le TGI de Lille était naturelle. La notion de « qualité essentielle » n’a jamais été considérée comme ayant une portée générale ou généralisable. Lorsque un mariage a été annulé parce que le mari était divorcé ou repris de justice, ou parce que la femme était ancienne prostituée ou stérile, il n’a pas été jugé que la fertilité était une qualité essentielle sans laquelle un mariage serait nécessairement nul. Il n’a pas été affirmé qu’une personne divorcée ne possédait plus les qualités essentielles à un nouveau mariage. Il n’a pas plus été affirmé qu’une condamnation criminelle interdisait un mariage ultérieur. Ou que les prostitué-es étaient privé-es du droit de convoler. Il a seulement été jugé que nul-le ne pouvait être contraint-e à se marier contre son gré avec un-e divorcé-e, un-e prostitué-e, une personne stérile, une-e repris-e de justice… Et se marier avec une personne dans l’ignorance de ces situations est bien, dans ce cas, se marier contre son gré. Ce qu’à Dieu ne plaise… Les « qualités essentielles » sont celles qui le sont dans chaque cas d’espèce, pour les parties en cause : en fait, celles qui déterminent le consentement au mariage de la personne qui demande son annulation. Et les juges apprécient librement la qualité des preuves qui leurs sont proposées, quant à la question de savoir si les qualités invoquées étaient réellement « essentielles » au consentement. On peut s’interroger, et même apporter des éléments de réponse critique, sur ce qui motive un homme à ne vouloir épouser une femme que si elle n’a jamais eu de liaison amoureuse ou de relation sexuelle avant lui. On peut combattre ces préjugés. Mais on ne peut pas faire comme si le jugement que l’on porte sur ces préjugés devait conduire à les ignorer, et à sauver à tout prix un mariage qui leur soit contraire. Un couple ainsi marié, pour le meilleur et pour le pire, en violation de préjugés, aussi détestables puissent-il être le cas échéant, risque en définitive de l’être surtout pour le pire.
Le tribunal de Lille n’a pas jugé que la virginité de l’épouse était, en termes généraux, une condition du mariage, mais que cette qualité était, dans ce cas précis, jugée essentielle par le mari, et qu’il avait été, sur ce point, induit en erreur. La femme en convenant, la preuve était bien rapportée, et la décision, par ailleurs opportune en fait semblait donc aller de soi en droit. Mais le juge aurait pu par exemple considérer que le demandeur en nullité d’un mariage n’était pas libre des qualités qu’il jugeait essentielles, et qu’était contraire « à l’ordre public et aux bonnes mœurs » la prise en compte de la virginité de l’épouse (ou de l’époux). C’est là une solution que certains tribunaux avaient déjà implicitement envisagée ; un jugement du tribunal de grande instance du Mans, par exemple, avait jadis dressé dans un obiter dictum (c’est à dire dans des développements qui n’étaient pas nécessaires à sa décision, et n’emportaient donc aucun effet juridique ou pratique) une liste de critères qu’il ne lui semblait pas possible d’admettre, au nombre desquels la virginité. Mais une telle décision ne pourrait prévaloir qu’au prix d’un retournement complet de la jurisprudence ; quid en effet de l’annulation pour divorce antérieur ? Ou pour prostitution antérieure ? Ou pour stérilité ? Pour séropositivité ? Comment définir où commence et où s’arrête la liberté dans les critères de choix de la personne qu’on épouse. Quelle « liste » pourrait-on établir, des critères licites ou illicites ? L’homme qui découvre un peu tard avoir épousé une « fausse blonde » peut-il poursuivre l’annulation de son mariage ? Admettrait-on demain une annulation de mariage parce que l’épouse croyait que son mari était d’origine portugaise, alors qu’il était espagnol (à ceux qui se récrieraient ici, l’erreur sur la nationalité du conjoint a déjà été jugée de nature à annuler un mariage…) ? Parce qu’un mari croyait que son épouse était juive, alors qu’elle ne l’était pas ? Parce qu’un des conjoints croyait que l’autre était toujours d’humeur égale, alors qu’il était colérique ? Doit-on à l’inverse condamner à demeurer mariées des personnes qui considèrent qu’elles se sont trompées dans le choix de leur conjoint, et que leur erreur porte sur une qualité essentielle pour elles, qui a déterminé leur consentement ? Il est vrai, dira-t-on, qu’ils peuvent toujours divorcer, dès lors que le divorce unilatéral est devenu relativement simple, et le divorce par consentement mutuel plus simple encore. Et lorsqu’un mariage n’a duré que peu de temps, les conséquences de l’annulation et du divorce sont, sinon identiques, du moins très proches, en particulier en matière patrimoniale. Si nos époux lillois, mieux conseillés par leurs avocats, avaient plutôt choisi la voie du divorce, ils se seraient épargnés l’étalage public de leur vie intime, et auraient échappé à tous ces commentaires « autorisés » de personnes qui ne les connaissent ni d’Ève ni d’Adam, et n’ont pas la moindre idée de ce que sont leurs sentiments profonds. Mais il est vrai que parler de personnes que l’on ne connaît pas, voire en leur nom, n’est jamais bien grave pour qui s’intéresse plus à des stéréotypes plus ou moins fantasmatiques et bien entretenus qu’aux gens réels, faits de chair et de sang.
Quoi qu’il en soit, personne n’a contesté, et pas plus le TGI de Lille que qui que ce soit, le droit au mariage d’une personne au motif qu’elle n’était pas vierge, qu’elle était séropositive, qu’elle s’était prostitué, qu’elle était divorcée, ou toute autre cause de ce genre. Mais le droit de se marier n’est pas le droit de se marier avec une personne qui n’est pas disposée à un tel mariage. Le consentement des deux époux doit être complet, chacun restant maître de ses critères, aussi absurdes, mesquins, hypocrites ou scandaleux qu’ils puissent éventuellement sembler.
Parmi les commentateurs qui ont approuvé la décision, certains insistent sur le
fait que ce n’est pas la non-virginité de l’épouse qui fonderait l’annulation prononcée, mais son mensonge prénuptial à ce sujet. Le point est pourtant douteux. Si tel avait été le cas, on aurait été en présence, non d’une erreur du mari, mais d’un dol de la part de la femme ; et l’adage précité, « en mariage, trompe qui peut », aurait fait obstacle à l’action en annulation. Ce n’est pas de mensonge, mais bien de virginité qu’il est question ; d’où la multiplication des cris d’orfraie.
On a proféré à cette occasion tellement de sottises, au milieu de rares commentaires plus judicieux, émanant généralement de juristes, qu’il serait illusoire de prétendre toutes les analyser. L’une des principales, bien sûr, en vertu d’une mode désormais tenace lorsqu’il est de près ou de loin question de musulmans, est la mise en avant du thème sacro-saint de la laïcité.
C’est Fadela Amara, semble-t-il, qui a lancé la première le grand mot : ce jugement devait être assimilé à une fatwa. Bien d’autres ont entonné ce refrain, sur une musique ou sur une autre : il y aurait eu une insupportable intrusion de règles religieuses dans un jugement rendu au nom du peuple français. On pourrait se borner à hausser les épaules. On pourrait aussi se borner à noter que rien dans le jugement n’évoque la moindre règle religieuse, et qu’il tire son fondement juridique du second alinéa de l’article 180 du très laïque Code civil. Mais nos bons esprits objecteraient sans doute que la référence religieuse était ici implicite, et que c’est de toutes façons pour des raisons religieuses que ce « musulman » aurait considéré que la virginité de son épouse était une condition de validité de son mariage.
Le fait est pourtant, si l’on en croit ceux qui parlent de cette question pour l’avoir étudiée, qu’aucune règle de droit musulman ne fait de la virginité de la femme ou du mari une condition de validité du mariage. À s’en tenir à des règles spécifiques à l’Islam, le juge aurait donc dû rejeter la demande. La religion musulmane n’est ainsi pas en cause dans la décision, mais seulement dans ses commentaires, à travers une vision fantasmatique et erronée. On peut certes imaginer, pourquoi pas, que cette vision fantasmatique était partagée, tant par le juge que par les époux concernés, et qu’ainsi ce seraient bien des motivations religieuses, même contraires à toute orthodoxie, qui auraient prévalu dans la demande, et auraient été admises par le tribunal. Et ici se trouverait l’atteinte à la laïcité.
Inutile d’évoquer les outrances islamophobes de la feuille électronique « Riposte laïque » ; le concentré d’idiotie de ses contributions prendrait trop de place à mettre en évidence. Mais le communiqué de presse du président de l’Union des Familles Laïques (UFAL), Bernard Teper, illustre assez bien l’insuffisance malveillante de beaucoup de commentaires. Il écrit : « Il se trouve que les deux époux sont de confession musulmane. Le tribunal aurait-il tenu compte de la religion des époux pour rendre son jugement ? De deux choses l’une : ou bien le tribunal a été différentialiste et a rendu un jugement discriminatoire, ou bien il faut comprendre que la virginité est devenue une qualité essentielle sur laquelle une future épouse ne doit dorénavant ni plaisanter, ni mentir. (…)Il s’agit d’un précédent : la République, en tant qu’elle est laïque, n’a jamais considéré, ni dans son esprit ni dans sa lettre, que la virginité pouvait être une qualité essentielle d’une citoyenne qui veut librement s’engager dans le mariage, fût-elle musulmane. Un jugement rendu par un tribunal français est prononcé au nom du peuple souverain, source de la volonté générale, et non pas au nom d’une religion, d’une tradition ou d’un droit coutumier. »
Comme on l’a vu, la réponse à la question posée est « non », mais le point importe peu. Les jugements sont toujours rendus en fonction de la personnalité des justiciables, et ceux-ci sont libres des critères sur lesquels ils décident de se marier ou non ; le principe de laïcité interdit ici d’écarter leurs motivations intimes sous prétexte qu’elles auraient une origine plus ou moins religieuse – alors même que l’on sait que de nombreux couples ne choisissent précisément de se marier plutôt que de vivre ensemble de manière différente que pour des raisons religieuses…
En outre, le système juridique français, fondé sur le droit écrit, interdit aux tribunaux de rendre des décisions de caractère réglementaire, dont la validité serait générale : les « arrêts de règlement », dont les Parlements de l’Ancien Régime avaient pris l’habitude, sont prohibés depuis la Révolution Française. La conception du droit qui préside au commentaire de Bernard Teper – et de quelques autres – semble ainsi marquée par la conception anglo-saxonne de la « common law », dans laquelle la règle du précédent est créatrice de droit. Les jugements n’ont, en France, d’autorité qu’à l’égard des parties au procès, et aucun tribunal ne pourrait dire en termes généraux que telle ou telle qualité est en elle même « essentielle » à toute personne pour contracter mariage. Les qualités en question sont évaluées, pour user du langage juridique, in concreto et non in abstracto. Telles qu’elles peuvent être appréciées dans une affaire particulière, et non dans l’absolu. Et la règle de droit appliquée est la même pour tous : l’annulation peut être prononcée s’il y a eu erreur sur des « qualités » dont il est prouvé, par tout moyen, qu’elles étaient considérées « essentielles » par la partie demanderesse. Tel est le sens de l’ensemble de la jurisprudence sur la question, à laquelle le jugement de Lille ne fait que se conformer. Aucune présupposition religieuse du juge n’était nécessaire. Sa décision était purement technique. Aucune atteinte à la laïcité de l’Etat dans cette histoire.
On n’a, cela dit, pas parlé que de laïcité dans cette affaire. Si on en a parlé, c’est parce que les parties au procès étaient de tradition musulmane. Et sur cette tradition, on n’a pas ménagé ses commentaires. La condescendance du voyeurisme orientaliste s’en est donnée à cœur joie. Et là où il était question d’un homme à qui sa jeune épouse révélait une liaison antérieure, on a glosé à n’en plus finir sur des histoires d’hymen et de draps tachés de sang. L’obligation faite au mari, dans des sociétés où la chasteté prénuptiale relève de l’évidence, de prouver publiquement sa virilité le soir de ses noces, se trouve ainsi mise à contribution par un contresens dramatique. Dans son beau roman à caractère autobiographique « Les chemins qui montent », l’écrivain algérien Mouloud Feraoun met en scène un de ces soirs de noces où, pour éviter l’humiliation à son jeune époux, la mariée se coupe au doigt pour tacher un drap, afin qu’il puisse échapper aux quolibets.
La principale raison pour laquelle on a ramené la question de la virginité à celle de l’hymen était qu’elle permettait d’affirmer que la décision n’était pas transposable d’un sexe à l’autre, puisque la virginité de l’homme ne peut pas être « prouvée ». On feint ici d’ignorer, à la faveur de préjugés tenaces, qu’une femme vierge peut très bien n’avoir pas d’hymen, ou l’avoir rompu de diverses manières, volontairement ou non. Dans l’affaire de Lille, la femme a expliqué qu’elle avait eu une liaison amoureuse avant son mariage ; toute autre explication aurait pu suffire à son mari, et il n’y aurait eu ni « drap taché », ni annulation de mariage. Il semble très clair que le motif de l’annulation n’était pas l’absence d’hymen, mais l’existence découverte par le mari après le mariage d’une liaison antérieure de l’épouse. Que le tabou, ou l’obsession de la virginité concerne plus les femmes que les hommes est une réalité sociale, idéologique certain
e, traduisant clairement un aspect de la domination patriarcale. Il n’y a pas si longtemps, dans la France républicaine, la tradition du « mariage en blanc » symbolisait la « pureté » de l’épousée. On voyait parfois des robes de mariée « blanc cassé », qui provoquaient des chuchotements parce qu’elles signifiaient que l’on n’avait pas affaire à une « vraie jeune fille ». Le « blanc cassé » était presque une manifestation ostensible de résistance aux codes sociaux. Le monde a un peu changé, mais les stéréotypes ont la vie dure, et la structure patriarcale de la société se révèle toujours dans les inconfortables robes de mariées d’un blanc virginal immaculé. On peut en parler tout à loisir et combattre cette structure sociale. Mais le jugement de Lille n’a rien à y voir.
La plupart des commentaires qui reconnaissent que, dans le fond, il n’était en toute hypothèse pas opportun de maintenir ce mariage mal engagé insistent sur l’idée que l’annulation pour « erreur sur les qualités essentielles » était néanmoins inadmissible, et que le divorce aurait été la seule voie à suivre. Il est vrai que de ce divorce, personne n’aurait parlé ; et chacun-e y aurait gagné. On pourrait d’abord toutefois remarquer qu’en droit, il est difficile de justifier un divorce par une « faute » commise avant le mariage. Ce qui était ici en cause était bien l’existence et le consentement à la formation même du lien conjugal. Le choix, désastreux par la publicité qu’il a suscité, de la procédure d’annulation était donc juridiquement le plus logique. Et cette publicité n’est en fin de compte due qu’à la précipitation avec laquelle un professeur de droit a voulu avant même que les voies de recours à son encontre soient épuisées, publier et commenter ce jugement, dont il avait eu personnellement connaissance, dans une revue savante. La décision serait demeurée inconnue du grand public, comme les dizaines milliers de décisions de justice rendues chaque année, sans cette publication au recueil Dalloz, et la gourmandise avec laquelle un journaliste de l’AFP en a tiré une dépêche dont la formulation manifestait une incompréhension totale de sa portée réelle.
Mais plus profondément, on peut se demander pourquoi le divorce serait acceptable, et l’annulation scandaleuse. Et il est difficile d’y voir autre chose qu’une marque de la sacralité du mariage, héritée par la République des traditions de l’Église catholique ; une marque du persistant attachement de bien des commentateurs à son caractère institutionnel. Cela semble bien naturel chez les plus rétrogrades et les plus réactionnaires, mais paraît étrange chez les personnes qui se réclament d’idéaux émancipateurs.
Car en définitive, c’est bien du mariage, plus que de la virginité des époux, qu’il est question. Et plus précisément de cette évolution à tous égards positive évoquée plus haut vers un infléchissement contractuel du mariage. Il s’en faut certes de beaucoup que la contractualisation de tous rapports humains représente un mouvement vers l’émancipation. Bien des solidarités se brisent sur la loi du contrat, et le contrat va souvent de paire avec la marchandisation croissante de la société, son émiettement, sa disparition même au profit du règne de la finance, l’isolement et la séparation des êtres humains dans un monde qu’ils ne peuvent plus maitriser. Mais s’agissant du mariage, il faut mettre sa contractualisation en balance avec la police des mœurs, avec le contrôle étatique des corps que représente son caractère institutionnel. À cet égard, la contractualisation des rapports amoureux est un mouvement d’émancipation qui conduit à la dissolution de cette emprise. Sa logique est celle de la liberté de la sphère intime.
Il est difficile à cet égard de comprendre une réaction comme celle, prise parmi de nombreuses autres, qu’exprime par exemple le communiqué rédigé à la hâte par la secrétaire nationale du parti communiste, Marie-George Buffet. Qualifiant de « monstruosité juridique » et « d’indignité » la prise de position initiale de la Garde des Sceaux Rachida Dati, qui évoquait non sans raison le fait que l’annulation du mariage en question était aussi un « moyen de protéger la personne » de la femme, Madame Buffet explique que « déclarer que la virginité peut être la qualité substancielle (sic) d’une femme revient à ramener le mariage à un vulgaire contrat. » Et d’ajouter : « La République est là pour protéger ses valeurs en vertu desquelles, le corps ne peut être considérer (sic) comme une marchandise. » La décision du tribunal de Lille serait, toujours pour elle, « un retour en arrière de plus de deux siècles, où la femme objet est la propriété de l’homme. » Conclusion : « Toute logique communautariste devrait être étrangère à la justice française, et Mme Dati aurait du (sic) demander au parquet de faire appel de cette décision, plutôt que de justifier l’injustifiable. »
L’idée que la position initiale de Rachida Dati devrait s’expliquer par une « logique communautariste » sous-jacente mérite-t-elle qu’on s’y attarde ? Ce serait un tout autre débat. Quant au reste, en quoi le caractère contractuel du mariage, c’est à dire le fait qu’il repose d’abord et avant tout sur la volonté et l’échange de consentement des époux est-il donc « vulgaire » ? Serait-il plus élégant qu’ils n’aient pas leur mot à dire ? N’est-ce pas dans ce cas que l’on remonterait plusieurs siècles en arrière, quand la plupart des mariages étaient « arrangés » dans le dos des jeunes époux, mis devant le fait accompli ? En quoi ce caractère fait-il du corps une marchandise ? Se marier librement avec la personne de son choix revient-il à l’acheter ou à se vendre ? N’est-ce pas plutôt dans le cas où une personne se voit contrainte au mariage que son corps pourrait s’assimiler à une marchandise ? Est-ce l’échange des consentements ou l’institution patriarcale du mariage, qui est de nature à faire de la femme la « propriété » de son mari ? Et dans une situation où le mariage tend à devenir égalitaire en droit, sinon en fait, qui donc est la propriété de qui ? Si le corps peut-être une marchandise, si la femme peut être propriété de l’homme, c’est le fait des structures sociales, non de l’échange de consentement par lequel deux personnes contractent mariage. Et l’institution du mariage reflète plus ces structures sociales que le libre choix des époux. Refuser le contrôle social des corps, c’est mettre en cause le mariage comme institution.
Puisque l’on évoque les cas d’annulation de mariage, pourquoi ne pas réfléchir pour finir à deux types de situations dans lesquelles des mariages sont systématiquement annulés ?
La grande majorité des mariages annulés, sont en réalité ceux que le Ministère Public choisit de qualifier de « mariages blancs ». On soutient dans ce cas que les personnes concernées n’ont pas « vraiment » voulu se marier, mais « seulement » profiter de certains avantages, en particulier en matière de droit au séjour ou de nationalité, conférés par le mariage. On a pourtant là affaire, dans la plupart des cas, à des personnes ayant échangé leur consentement en toute connaissance de cause ; mais l’administration vient ici contrôler l’usage qu’ils entendent faire de leurs corps. Elle vient affirmer que se marier, c’est seulement vouloir donner un cadre légal à des relations sexuelles, vouloir « fonder une famille », etc. On brandit ainsi le « mariage-institution » contre le « mariage-contrat ». Et pour favoriser la chasse à l’étranger, dans le cadre d’une politique régressive de l’immigration, l’Etat s’appuie sur son droit à contrôler les intentions des partenaires d’un mariage, et l’existence effective d’un lit conjugal.
Plus rares, et même exceptionnels, mais tout aussi significatifs, sont les cas d’annulation de mariages homo
sexuels lorsque, comme à Bègles, il se trouve des élus pour les célébrer. Là encore, on protège l’institution contre le contrat. Là encore l’Etat s’impose comme organisateur d’une sexualité licite, en contestant aux intéressés eux mêmes le choix des personnes auxquelles ils entendent lier leur vie, et le cadre dans lequel ils entendent le faire.
Si vierge ou non, il est en France licite de se marier, mieux vaut être pour cela bien pourvu de papiers, et conforme à la norme dominante hétérocentrée. Si l’institution du mariage sert à quelque chose, cela reste encore à maintenir le noyau dur du contrôle social de la sexualité. La défendre becs et ongles et prétendre limiter son caractère contractuel est bien un combat d’arrière-garde.