Le 10 novembre, toutes les associations, les collectifs, les syndicats et les partis politiques qui veulent dire stop au racisme et à l’islamophobie en France appellent à une marche commune. Mouvements relaie cet appel et s’inscrit évidemment dans cette mobilisation et son élan. L’attentat contre la mosquée de Bayonne le 28 octobre dernier et les motifs invoqués par son auteur disent la gravité de la situation et l’urgence à agir.
Comme le dit très clairement le texte de l’appel, depuis des années, les musulman.es vivant en France sont les cibles de formes de stigmatisation de plus en plus violentes et radicales. Cette stigmatisation se matérialise dans des actes de discrimination quotidiens : 32% des musulman.es qui vivent en France déclarent avoir subi une discrimination dans les 5 dernières années selon la dernière étude de la Dilcrah et ces chiffres atteignent 60% pour les femmes portant un foulard. Ces discriminations ont une dimension institutionnelle et les stigmatisations sont relayées par les pouvoirs publics avec des dérives particulièrement inquiétantes : les déclarations du ministre de l’Education nationale, Jean-Michel Blanquer notamment contre les accompagnatrices de sorties scolaires portant un voile et l’épisode effarant des « signaux faibles de radicalisation » mis en avant par plusieurs circulaires ministérielles en sont des formes les plus récentes.
L’émotion créée par l’agression subie par une mère de famille au conseil régional de Bourgogne-Franche-Comté le 11 octobre aura été un double déclencheur. Celui d’une vague médiatique sans précédent de discours racistes et islamophobes venant aussi bien de responsables politiques que d’« experts » et de polémistes en tout genre saturant l’espace public.
Mais, fort heureusement elle aura été aussi à l’origine d’une nouvelle prise de conscience de l’ampleur et de la diffusion du racisme explicite visant les musulman.es –une islamophobie qu’il faut qualifier comme telle – et devant lesquelles le cadre légal de l’Etat, censé garantir l’égalité, la dignité et l’intégrité de toutes et tous, vacille de plus en plus. Pour la plupart des organisations progressistes et de gauche, l’urgence à réagir s’est imposée et cette mobilisation est en tous points rassurante : elle dit le refus de la haine, elle dit la solidarité, elle dit la défense de la participation pleine et entière des musulman.es de France en tant que citoyen.nes et en tant que musulman.e.s, à la vie de la cité sans que cela déroge en quoi que ce soit à la laïcité.
Comme lors de toutes les mobilisations sur ces questions, aussi centrales que clivantes dans le débat public et politique en France, d’aucun.es s’inquiètent, blâment et remettent en cause la justesse de cet appel à marcher. Il est effectivement un fait incontournable : en France, défendre la liberté de conscience et de culte en général, et la reconnaissance de la place de l’islam dans l’espace public n’est pas toujours évident pour une partie des organisations de gauche, voire pour la gauche au sens large. Ces dernières s’empêtrent dans une forme d’injonction contradictoire entre défense historique de la laïcité et lutte contre l’islamophobie.
C’est en posant ce postulat non pas comme un obstacle mais comme un point de départ, que Mouvements appelle résolument à se joindre à la marche du 10 novembre pour dire encore une fois et autant qu’il le faudra « Stop à l’Islamophobie et au racisme » !